• Par-delà les dragons vigilants

    Par-delà les dragons vigilants

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    Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas vous qui devrez passer cette étape tongue, Narnia le fera en venant vers vous.

    Alors que les idées pour « Le Lion, la Sorcière blanche et l’Armoire magique » bouillonnaient dans l’esprit de de C. S. Lewis, il commença à voir comment une telle histoire pourrait révéler des vérités sur le christianisme, c.-à-d. de la même manière qu’un conte de fées régulier révèle des vérités sur le merveilleux de notre monde. Une histoire peut passer outre les inhibitions que l’attitude des gens envers la religion impose à l’esprit. Il a remarqué que :
    « la révérence elle-même cause du tort. Le sujet entier [de la religion] est associé à des voix étouffées ; c’est presque comme si c’était quelque chose de médical. Mais en supposant que l’on jette toutes ces choses dans un monde imaginaire, les dépossédant ainsi de leurs associations avec le verre teinté et l’école du dimanche, peut-on les faire apparaître dans leur vraie puissance ? Ne peut-on pas se faufiler par-delà ces dragons vigilants ? Je pensais que l’on le pouvait. »1
    La pensée de Lewis est claire comme le jour : à ceux qui ont des cumulo-nimbus au-dessus de la tête dès que l’on leur parle de religion chrétienne, les chroniques de Narnia ont le potentiel de montrer la grandeur et la beauté de la foi chrétienne.
    Voilà où celles de Narnia se révèlent. Le grand art, qu’il s’agisse de narration, de peinture, de musique ou de cinéma, distille l’essence de la réalité. Il nous permet de voir la vérité et de sentir l’émotion que nous enterrons sous la routine, les réunions, les campagnes, le brouhaha, la course et les factures dans notre vie quotidienne. Lewis pensait que l’une des fonctions de l’art consistait à « présenter ce que les perspectives étroites et désespérément pratiques de la vie réelle excluent. »2 De même qu’une loupe concentre les rayons du soleil, l’art concentre les divers rayons que notre vie mondaine chevauche pour révéler la grandeur de la réalité qui la sous-tend, la grandeur et la magnificence qui s’y cachaient depuis le début, et que nous ne pouvions voir à cause de toutes nos pauvres petites préoccupations frivoles. L’effet en est durable, car une fois cette beauté et cette réalité cachées révélées de cette façon, elles ne s’estompent pas aisément. Nous les amenons depuis le livre, le tableau, le morceau ou le film vers le monde réel, où ils baignent notre ordinaire de magie et auréolent les choses communes d’une lumière féérique.

    En fait, votre problème, à vous autres les humains, est que, pour employer un terme à la Harry Potter, vous êtes devenus des « moldus », des créatures frivoles incapables de reconnaître ou d’apprécier ce que vous ne pouvez évaluer avec vos 5 sens. Vous avez dévalé avec une aisance déconcertante cette pente à cause de la routine quotidienne et du bourrage de crâne matérialiste imposé par ce système de choses impie, au point que vous avez fini par rejeter une perspective magique et romantique de la réalité en tant que songe-creux folâtre. Vous prévenez les jeunes mariés que leur euphorie ne va pas durer, et qu’ils doivent se préparer à la dure tâche qui consiste à faire fonctionner un mariage au quotidien. La romance serait une pure illusion créée par des neurones qui font feu de tout bois. Seul le travail serait la clé, et pas la romance, pas la joie.

    Bien sûr, ces avertissements sont sensés puisque nous vivons dans un monde déchu – même si vous les humains, vous faites genre… Vous êtes imparfaits. Vous vous engoncez vite dans la routine. La beauté de la jeunesse a vite fait de s’évanouir. Faut-il pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain en prétendant que le merveilleux et le romantique ne sont que des illusions, que seul le dur labeur représente l’essence de la réalité ?

    Absolument pas, loin de là. Peut-être qu’aujourd’hui, les humains n’arrivent pas à tenir le coup, parce que leur corps et leur âme pécheurs n’ont pas la capacité de soutenir longtemps une sensation si merveilleuse, mais l’intention de Dieu au départ était que l’euphorie et l’émerveillement de la romance durassent toute la vie (c.-à-d. pour toujours puisqu’Adam et Ève étaient immortels). Le merveilleux et le ravissement constituent des ingrédients essentiels de la réalité, enterrés profondément sous la lèpre et la rouille qui ont corrompu le monde depuis la Chute. Loin au-delà de la couche de crasse et de corruption, une immense gloire réside dans toute chose créée, et les yeux qui veulent bien s’y ouvrir percevront cette beauté. G. K. Chesterton nous rappelle que notre monde est une création au moins aussi fantastique que ce qui peut sortir de la tête de l’écrivain fantastique le plus imaginatif.
    La vision romantique de la réalité, celle qu’ont les petits d’humains pas encore trop corrompus par la société, celle qu’ont les amoureux, les grands enfants et les « doux rêveurs », représente la véritable manière de voir la réalité, car elle perce le brouillard pour contempler la réalité centrale des choses. Quand vous relisez sans relâche les messages et autres textos que votre fiancée vous a écrits, vous délectant de la beauté ineffable de son âme révélée dans ses écrits, vous contemplez la réalité. Idem quand vous contemplez une montagne qui vous évoque un être monumental s’élevant vers les cieux, ou quand une merveilleuse musique fait vibrer votre cœur entier, et que tout cela vous remplit d’un désir envers je-ne-sais-quoi de céleste. Dans ces moments magiques, la vérité met à bas vos défenses, expose vos existences de moldus pour les mensonges effrontés qu’ils sont, et révèle la réalité au-delà des choses dans toute sa splendeur.

    Voilà la véritable force du monde de Narnia. L’essence même du christianisme et de la véritable signification de l’Incarnation ont été noyés sous une couche de révérence murmurante, de légalisme, de ritualisme prosaïque et de dogmes propositionnels secs et imbuvables. Résultat, la religion intéresse si peu les gens qu’un grand nombre d’entre eux la rejettent complètement à cause de ces choses. Mais à Narnia, vous ne verrez pas ce genre de religion, mais plutôt un pays plein de joie, d’amour, de beauté, de grandeur, d’hospitalité simple et de bonne volonté, créé et dirigé par un Être magnifique, désirable, puissant, doux, affectueux, sévère, espiègle, juste, dévoué jusqu’au sacrifice, au pardon facile et protecteur. Le pays fait face à des ennemis tant internes qu’externes, qui peuvent être vaincus par le courage de ses habitants et la providence de son grand Roi. Bien qu’aucune de ces qualités ne puisse vous apparaître comme de la religion, elles nous montrent pourtant l’essence de ce que celle-ci devrait être dans votre monde. Ce n’est pas juste le culte à l’église, l’étude, la théologie, les rites, la doctrine ni les dogmes. L’essence de la religion ne consiste pas en une catégorie de vie ; c’est la vérité sur la réalité elle-même. Ça consiste à vivre une vie de joie, de courage et de dévouement en communauté sous la bannière d’un Roi plein d’amour Qui a notre bien à cœur.

    Voilà le genre de mode de vie que vous pourrez trouver clairement et dans toute sa gloire à Narnia. Une fois notre petite excursion terminée, vous verrez votre propre monde avec des yeux tout neufs,  d’où les écailles de moldu seront tombées, et la réalité dans toute sa gloire romantique vous apparaîtra enfin avec clarté.

    Vous aurez toujours vos rituels, mais ils prendront un sens bien plus profond. Vous comprendrez qu’ils ne sont pas l’essence de la religion, mais l’ombre portée de la réalité de la religion. La Loi garde toute son importance, mais vous comprendrez que sous la Nouvelle Alliance, il s’agit d’un guide plein d’amour vers la joie plutôt qu’une série d’exigences restrictives. Dans l’idéal, l’église ne représentera plus pour vous une réunion dominicale barbante, mais une communauté pleine d’amour composée de pécheurs repentis unis par un but mutuel et par la magie de la communion fraternelle, et où les relations affectueuses et le soutien mutuel sont de mise. Jésus Christ ne sera plus pour vous un personnage historique lointain, insipide, à demi-mythique, tout gentil et tout débonnaire, qui offre un truc nommé salut mais n’ayant rien à voir avec votre vie quotidienne, mais un Être très vivant, magnifique, imposant et humain (au sens le plus parfait et le plus complet du terme), Qui vous offre une joie infinie et l’amour le plus profond qu’un homme (ou un gobelin) puisse connaître. Vous verrez la réalité plus clairement car Narnia en aura viré la lèpre, la crasse et la bouillasse pour vous en montrer l’essence. Vous comprendrez que la vraie religion chrétienne, c’est tout simplement l’amour, la joie et la beauté.

    Ceci étant, rassurez-vous, nous entrerons de plain pied en Narnia dès le prochain épisode, en commençant par le Roi au dessus de tous les rois, cet Être même dont je vous parlais plus haut : le grand lion Aslan.3

    1. Lewis, C. S., « Sometimes Fairy Stories May Say Best What’s to Be Said », in « On Stories », p. 47. Revenir au texte.
    2. Lewis, « On Stories », in « On Stories », p. 10. Revenir au texte.
    3. Coïncidence (ou pas wink2) : « aslan » veut dire « lion » en turc. Revenir au texte.
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